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18 - Brisez vos machines - Père Saint Ignace.JPG
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Transcription

Le 29 juillet 1830, alors que la Révolution des Trois Glorieuses renverse le régime de la Restauration en France, des ouvriers imprimeurs-typographes en profitent pour envahir des imprimeries à Paris et y briser les presses mécaniques récemment introduites dans les ateliers. Profitant de l’ouverture des possibles qui suit la révolution politique et la multiplication des barricades, les travailleurs typographes énoncent leur refus des nouvelles machines sources de misère. Depuis plusieurs années en effet, les principaux ateliers d’impressions de la capitale française commencent à mécaniser le travail en introduisant les nouvelles presses mécaniques à cylindre, d’abord utilisés en Grande-Bretagne, et qui accroissent la productivité du travail. Les artisans et ouvriers dénoncent ces mécaniques décrites comme tyranniques, à l’origine de la misère et d’une dégradation de la qualité du travail typographique. Pour les autorités et les philanthropes à l’inverse, la mécanisation de l’imprimerie s’affirme comme une nécessité pour répandre les lumières et l’instruction. Dès le 30 juillet, les autorités affichent sur les murs de la capitale des appels « à ne plus détruire les presses mécaniques ». Toutes les paroles qualifiées sont rapidement mobilisées pour montrer aux ouvriers leur erreur et condamner ces violences, et rapidement les machines détruites sont rétablies. En réponse, le 2 septembre 1830, une foule immense d’ouvriers typographes, estimée entre 2 000 et 3 000 individus, se réunit aux barrières pour élire une commission de treize membres chargée de porter les revendications de la main-d’oeuvre. Les commissaires rédigent une délibération qui est affichée dans la ville et envoyée à tous les maîtres imprimeurs. Elle affirme que « Dans nos intérêts réciproques, la Commission s’engage et engage ses Confrères à ne pas travailler dans les maisons où des mécaniques seraient en activité », la grève conduit à l’arrêt de parution de plusieurs journeaux. Mais ces actions provoquent largement l’incompréhension alors que l’essor de la presse devient une force révolutionnaire. Durant l’automne 1830, de nombreux articles et gravures tournent en dérision ces actions populaires incomprises et méprisées. Le saint-Simonien Machereau en particulier publie une série de gravures mettant en scène ces troubles comme cette image intitulée : « Nouvelle interprétation de l’article 14. La Charte prohibe les tournebroches mécaniques ». En août et septembre 1830, les typographes justifient en effet fréquemment leurs actions par l’appel à la Charte de 1814. Le 5 septembre, le Journal de Paris reçoit par exemple une lettre d’un typographe dans « laquelle le réclamant s’appuie, pour demander le bris des presses mécaniques, de l’article de la Charte qui permet à l’État d’exiger le sacrifice d’une propriété pour cause d’intérêt public ». En transformant les fières typographes, ouvriers lettrés qui incarnaient l’aristocratie du travail, en gras cuisiniers, il s’agit de tourner en dérision leurs actions et revendications pour, in fine, les rendre invisibles et inaudibles. cf. F. Jarrige, Au temps des « tueuses de bras ». Les bris de machines à l’aube de l’ère industrielle (1780-1860), Rennes, PUR, coll. Carnot, 2009.

Translation

On 29 July 1830, when the ‘Three Glorious Days’ Revolution overthrew the Restoration regime in France, printer-typographers took the opportunity to invade printing shops in Paris, smashing the mechanical presses recently introduced there. Taking advantage of the opportunities that followed the political upheaval and the multiplication of barricades, the typography workers attacked the machines, denouncing them as the cause of their increasing poverty. For several years, the main printing workshops in the French capital had been mechanising labour processes and increasing labour productivity by introducing new mechanical cylinder presses, first used in Great Britain. Craftspeople and workers denounced these mechanical innovations as tyrannical, as undermining their livelihood, and as resulting in a deterioration of the quality of typographic work. For the authorities and for philanthropists, however, the mechanisation of printing had become a necessary means to spread enlightenment and education. From 30 July, the authorities hung posters on the walls of the capital with calls to 'stop destroying mechanical presses'. Leading figures were quickly mobilised to convince the workers that they were making a mistake and to condemn their violence, and the destroyed machines were quickly restored. In response, on 2 September 1830, a huge crowd of typography workers, estimated at between 2,000 and 3,000 individuals, gathered at the barriers to elect a thirteen-member commission representing the demands of the workers. The commissioners wrote a declaration that was displayed on posters throughout the city and sent to all master printers. It stated that 'In our mutual interest, the Commission commits itself and its members to not work in shops where mechanisation is active.' The strike prevented several newspapers from being published. However, these actions were for the most part not well received, as the rise of the press was seen as a revolutionary force. In the autumn of 1830, many articles and engravings ridiculed and denounced these misunderstood popular measures. The Saint-Simonian Machereau in particular published a series of engravings depicting the disorders, such as the image entitled: 'New interpretation of article 14. The Charter prohibits mechanical spindles.' In August and September 1830, typographers frequently justified their actions by reference to the Charter of 1814 (the constitutional charter established after the fall of Napoleon). On 5 September, for example, the Journal de Paris received a letter from a typographer stating that 'the claimant relies, in order to request the destruction of the mechanical presses, on the article of the Charter which allows the State to require the sacrifice of property in the public interest'. The print depicted the proud typographers, literate workers who incarnated the aristocracy of labour, as fat cooks, thus mocking their activities, and ultimately denying them legitimacy and rendering them invisible.

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