A la fin du mois d’octobre 1831 est paru le prospectus du journal des canuts, L’Echo de la fabrique : les ouvriers annoncent, « sans défense jusqu'à ce jour contre les menées du commerce, en butte aux brutalités, aux injustices criantes de certains de MM. les négociants dont on n'ignore ni la condition primitive, ni le marchepied qui les a aidés à se hisser sur des coffres forts immenses, les infortunés ouvriers ont choisi, pour arme défensive de leur droits, la publicité ». Hebdomadaire, L’Echo est le premier journal ouvrier pérenne à être publié en France et il paraît régulièrement jusqu’au lendemain de l’insurrection d’avril 1834. Né en 1800, Marius Chastaing en est l’un des principaux journalistes puis rédacteurs. Chastaing n’est pas un canut, mais un légiste et il se voue au journalisme, comprenant qu’avec la presse moderne vient de naître un media nouveau qui va permettre de faire résonner dans l’espace public des voix inédites, notamment celle des ouvriers. Il qualifie ambitieusement le journal : « BOUCLIER, un journal sert d’armes défensives ; JAVELOT, il sert à l’attaque ; MIROIR, il réfléchit les opinions ; ARENE, il leur ouvre un champ libre ; TABLE RASE il reçoit et conserve leur expression diverse ». Chastaing se veut journaliste ouvrier. Dans ses articles il va aborder les questions saillantes liées à la réglementation de l’industrie de la soie à Lyon et il sera par exemple l’avocat enflammé de toutes les mesures, libre-défense, jurisprudence fixe, permettant d’améliorer le fonctionnement des prud’hommes dans le sens d’une meilleure protection des tisseurs et d’un paritarisme mieux respecté. Mais il tente surtout de faire de L’Echo de la fabrique puis de L’Echo des travailleurs les journaux d’une « caste prolétaire », compacte et solidaire, dépassant les frontières restreintes de la Fabrique et de ses tisseurs, une caste éduquée et éclairée par une propagande républicaine frayant les voies de l’égalité politique mais aussi de l’égalité sociale. Quelques mois après l’insurrection d’avril 1834, il relance l’aventure de cette petite presse ouvrière en créant La Tribune prolétaire, un nouveau journal qui se veut le concurrent plus encore que l’allié ou le complément de L’Indicateur, le journal des mutuellistes. Toutefois après la révolte de 1834, et en plein procès des accusés d’Avril, la presse d’opposition est sous l’éteignoir et les procès se succèdent jusqu’à la cessation de parution de La Tribune, en juillet 1835. Quelques semaines plus tard l’attentat contre le Roi commis par Fieschi va conduire aux « lois de septembre » qui suspendent les libertés acquises en 1830, au premier rangs desquelles celles sur la presse. Il faudra attendre 1840 pour voir resurgir, avec de nouveau l’infatigable Chastaing, une nouvelle vague de journaux ouvriers à Lyon.

Marius Chastaing (1800-1866) relancera l’aventure de la presse ouvrière lyonnaise au début des années 1840. Il sera le rédacteur de L’Echo de la fabrique de 1841 puis de la Tribune Lyonnaise, publié entre 1845 et 1849.